L’argent que nous plaçons à la banque n’est pas statique. Ce que nous savons moins c’est que cette dernière peut faire basculer notre budget vers le négatif avec des frais bancaires costauds dénoncés par de nombreuses associations de consommateurs. Découverts, produits bancaires onéreux, frais de tenue de compte… La liste est longue et les chiffres peuvent vite grimper. L’addition à la fin du mois est salée et ce sont les budgets les plus modestes qui en pâtissent le plus. Fatigué des spéculations de leurs agences, un nombre grandissant de personnes se tourne désormais vers des solutions moins onéreuses comme les banques en ligne. Des abus sur les frais qui soulignent un peu plus l’actuelle fragilité d’un marché bancaire traditionnel. Focus sur ces frais qui gangrènent la popularité des banques.
Sandra à 55 ans, deux enfants à charge, des impôts, des crédits et d’autres factures à payer à la fin du mois. C’est pourquoi avec son SMIC, elle ne parvient pas à ne pas franchir la terrible ligne du découvert bancaire. Systématiquement dans le négatif, cette dernière doit en plus payer le prix de son découvert par des frais d’incidents bancaires qui à l’année peuvent lui revenir très cher. De plus, viennent se greffer à cela d’autres malus largement pratiqués par les banques comme une pénalité à la suite d’un chèque non-approvisionné ou encore des frais liés à ce qu’on appelle la commission d’intervention. Mais le cas de Sandra n’est pas exceptionnel. Face à l’incapacité de payer leur créancier avec un argent que beaucoup ne possèdent pas, l’interdiction bancaire exclut encore des milliers de personnes du système bancaire.
Dans les faits, l’interdiction bancaire ne remet pas en cause le droit d’un compte et de ces services minimum. Un droit d’ailleurs renforcé à l’échelle de l’Union Européenne avec la création en 2014 d’un « compte de paiement de base » permettant à toutes et à tous d’accéder aux services élémentaires d’une banque à savoir le retrait d’argent liquide, la réception et l’envoie des paiements, l’obtention d’une carte et l’acquisition de quelques chèques. Une directive qui vise également à rendre plus clair les frais pratiqués par les banques. En imposant la présentation de sa carte tarifaire à son futur client, la banque alarme sur les éventuels surcoûts qu’un client n’aurait pas vu venir. Malgré les efforts, la racine du problème est tenace. Tout d’abord il est important de souligner que ces offres de base peu couteuses voire gratuites imposées aux banques n’effacent pas le fait que la majorité ne peut survivre seulement avec le strict minimum. Les foyers les plus modestes ne peuvent s’en sortir sans l’aide d’un crédit voir plus et autres prêts. Un constat qui explique qu’en 2018, près de 4 adultes sur 10 dans le monde ne possédaient toujours pas de compte bancaire. L’UE n’a toujours pas réussi à rendre son marché monétaire plus inclusif mais également plus homogène. En effet, on observe des disparités également entre les pays européens. Les banques allemandes peuvent se « vanter » d’être plutôt clémentes en appliquant des frais bancaires qui s’articulent autour de trois euros par mois. En revanche, à l’opposé, la France multiplie ce tarif par six. Comment ne pas s’y perdre ?
Frais bancaires, ils sont plus nombreux que vous ne le croyez
En France, une enquête du magazine « 60 millions de consommateurs » avait chiffré en 2017 le bénéfice des banques à 4,9 milliards d’euros uniquement sur ces frais d’incident de compte. Mais au-delà de la facture du découvert autorisé déjà bien garnie, les banques gagnent également de l’argent en facturant d’autres services encore moins évidents à détecter. Les banques se rémunèrent donc également sur les prêts en prélevant des frais de dossier et des indemnités de rachat anticipés lorsqu’un client passe à la concurrence. Octroyer des crédits pour percevoir une marge d’intérêt se place cependant à la tête du podium en termes d’activité lucrative pour les agences. Une source de revenue juteuse qui s’articule autour des commissions prélevées sur ces crédits: tarifs bancaires, frais de dossier, frais de gestion sur l’épargne.
Mais comment accepter de payer aussi pour l’entretien de ma banque et de contribuer à ses propres factures ? Salaire du personnel, aménagement des agences, changement d’un matériel informatique qui serait devenu trop vieux… Débourser de sa poche pour le confort de sa banque semble impensable pour de nombreuses personnes et c’est portant ce qu’englobent les frais de tenues de comptes que nous devons payer. La banque profiterait de l’argent durement gagné par ses clients renforçant ainsi la vision d’une entreprise assoiffée d’argent. Pour alléger ses frais bancaires, nombreuses sont les personnes qui se sont détachées petit à petit de ce système désormais jugé trop calculateur afin de se tourner vers des alternatives moins couteuses. Et chacun y va de son plein gré. Certains misent sur une solidarité avec l’utilisation du prêt entre particuliers et son côté philanthrope quand d’autres se ruent vers la Fintech et sa nouvelle vision de l’économie.
Frais bancaires, bientôt un mauvais souvenir ?
Ces dernières années ont mis un frein à l’expansion de cette structuration classique du système bancaire. Poussé par la crise de 2008 qui a accentué la méfiance des gens sur économie et obligé de reconnaitre l’arrivée de nouveaux acteurs en ligne, le secteur bancaire traditionnel a dû s’adapter. Pour les clients, cela s’est donc traduit par une visible baisse des agences bancaires à l’échelle européenne autrefois si commune à notre paysage quotidien provoquée aussi par la baisse de la rémunération d’épargne et le turnover des conseillers bancaires. La dématérialisation des services bancaires vers le numérique est un franc succès. Libéré des carcans de la mécanique spéculative des agences, les banques en lignes, qui découlent la plupart du temps des groupes bancaires traditionnels, ont réussi à alléger les frais notamment ceux de tenue compte descendu à zéro. Mais cette gratuité quasi totale est tout de même soumise à condition. Certaines d’entre elles exigent encore des revenus mensuels minimums trop élevés pour les personnes les plus fragiles financièrement parlant.
Les derniers nés de la Fintech ont donc poussé la logique encore plus loin en créant des « comptes bancaires » réellement accessibles à tous. C’est en tout cas la promesse des néo-banques qui conquissent le continent européen avec de plus en plus d’assurance. Premiers consommateurs de ces banques de poche les Anglais qui étaient en 2019 4,5 millions à les utiliser. Derrière le leader, la France ( 2,53 millions) talonnée par l’Espagne ( 1,08 millions), des pays convaincus par les grands noms du milieu comme l’allemande N26, l’anglaise Revolut ou encore la néerlandaise Bunq. Leur premier atout séducteur? Une inscription rapide et qui ne s’apparente pas à un contrôle fiscal avec une demande de documents épurée, un simple justificatif d’identité et de domicile, exit la condition d’un revenu minimum. En plus d’acquérir une carte bancaire gratuite, le mauvais souvenir des frais bancaires s’envole avec une interdiction au découvert et un contrôle de son solde en temps réel. Fini donc les surprises à la fin du mois. Mais les néo-banques sont surtout les amis des voyageurs et d’une génération de digital-natives qui bouge sans cesse. En effet, elles ont fait disparaître les frais de commission sur les payements ou les retraits en devise étrangère, de quoi partir le coeur et le porte-monnaie légers. Face à ces avantages considérables, la pratique abusive des frais bancaires par les banques traditionnelles apparaît aujourd’hui comme facilement contournable et l’accentuation de la concurrence n’est pas prête d’améliorer la santé déjà fragile des agences bancaires.