La vie n’est pas un long fleuve tranquille. À l’image d’un quotidien malléable, notre porte-monnaie peut-l’être aussi et subir les secousses de multiples facteurs. Chômage, accumulation de crédits, prix des loyers vertigineux, maladies… C’est toute la mosaïque d’une société qui doit être prise en compte pour évaluer un surendettement gangrénant l’insertion. En tant que mère nourricière, il est impératif que l’Union Européenne prenne le pouls d’une population où l’inclusion bancaire se relève être la condition sine qua none à l’inclusion sociale et ce à travers des services bancaires toujours plus adaptés aux situations les plus meubles. Face à cet organe pilote, le rôle social des Fintech et autres néo-banques semblent étrangement déconnecté d’une réalité en dents de scie. Devant ce dialogue numérique, le scepticisme est palpable.
Le constat est sur le ponton, prêt à tomber à la renverse. La banque subit une secousse identitaire indéniable depuis la crise de 2008. Baisse historique des agences à travers l’Europe, notre chère demeure financière se voit pointer du doigt et mise en concurrence par des technologies financières inédites et novatrices. Mais face à ce séisme, la banque peut se vanter de ramer avec assurance sur son rôle pionnier en terme de capteur social. En véritable cocon protecteur, la banque vise à l’insertion de toutes et tous à travers une large gamme de produits et de services adaptés à des demandes aux multiples nuances des particuliers. Alors que l’on pouvait reprocher à notre cher Vieux Continent sa frilosité et son manque d’ambition initiale dans sa lutte contre l’exclusion financière, la tendance actuelle se tient plutôt à l’inverse. La construction historique d’un marché européen unique se dépoussière en exprimant la volonté de se diriger vers le renforcement d’un squelette financier plus centré sur le citoyen et ses divers besoins. Si l’agence bancaire veut faire peau neuve, c’est bel et bien ce lien de confiance avec le client qu’elle devra resserrer d’un cran.
En 2014, la Commission européenne avait révélé que tous les citoyens de l’Union Européenne ne bénéficiaient pas d’un accès aisé à un service de compte bancaire en soulignant qu’il s’agissait pourtant d’un « service essentiel dans le monde moderne ». Un drôle de constat qui entre en coalition avec l’aspect d’une société lisse vendu par des discours marketing et autres publicités où tout le monde disposerait d’une jolie carte de crédit et d’ avantages offerts par une banque idéale aux tarifs légers. Une vision pourtant privilégiée face à une population qui peine à joindre les deux bouts. Exemple, fin 2014, les prêts à l’habitat représentaient 85% de l’endettement global des ménages européens. Plus généralement, les vannes des crédits demeurent encore aujourd’hui grandes ouvertes. La précarité bancaire n’est pas une fiction.
L’Europe place des électrodes sur l’accès aux comptes de paiement
Pour trouver des solutions face à la situation financière des populations les plus exclues, l’UE a décidé de pousser avec plus de vigueur les portes de ses banques. En principe, tout citoyen a le droit d’ouvrir un compte de paiement de base n’importe où sur le territoire de l’Union. Pour renforcer cette démarche, il est également essentiellement d’éclaircir et de renforcer la transparence quant aux frais liés à la bancarisation. Afin de répondre à cette demande de justice sociale essentielle, les banques traditionnelles disposent donc de services et de présentations de bases auxquelles tout le monde peut avoir accès: la délivrance d’une identité bancaire, la domiciliation de virements bancaires, le droit aux virements bancaires et autres services de paiement et d’encaissement, le dépôt de chèques et d’espèces en agence…
Un socle de base pouvant cependant vite révéler des limites à son compteur. En effet, l’offre initiale peut s’avérer pour beaucoup de clients insuffisante au vu de leurs projets financiers. Affiner sa démarche bancaire serait trop onéreux. Pour enlever la grimace d’un nouveau souscrivant à un compte, les banques 2.0 s’arment d’arguments séducteurs. Une inscription éclair et requierant peu de paperasse enlevant ainsi une certaine discrimination à la bancarisation, une offre de base 100% gratuite et aspect mobile ingénieux pouvant convenir aussi bien aux digital natives qu’aux personnes isolées… Les néo-banques entendent bien rivaliser. D’ailleurs, depuis peu l’Europe encourage des services bancaires toujours plus innovants. Bruxelles a souligné l’importance de ces nouveaux acteurs à l’origine de moyens de paiement inédits et à bas coûts à l’heure où « 60% de la population de l’UE ne possède pas de carte de crédit.» Mais alors que la volonté décrite par la Commission de « moderniser les services de paiement en Europe au profit tant des consommateurs que des entreprises, de manière à rester en phase avec ce marché en évolution rapide », les multiples acteurs du domaine se tirent encore dans les pattes. Commission, Autorité Bancaire Européenne ( ABE), agences bancaires et startups de la Fintech (technologies financières) s’interrogent sur la place du consommateur dans ce flot numérique. Un véritable défi.
Banques traditionnelles et néo-banques, un écart sur le service
Allô, il y a quelqu’un au bout du fil? Si la néo-banque cultive un format simple d’utilisation notamment à travers des applications facilement accessibles, on pourrait lui reprocher son manque de service client qualitatif. Totalement en ligne ou parfois même relayé principalement sur les réseaux sociaux à l’image de N26, l’accompagnement de ce type de banques s’adresse surtout à une population très à l’aise avec le numérique et qui n’aurait pas peur de suivre une assistance à distance. Un modèle qui risque de faire grincer les dents des technophiles mais aussi d’une population vieillissante subissant de plein fouet cette discrimination dans une société où le tout connecté semble inévitable.
La majorité ne serait donc pas tout à fait prête à renoncer à l’accompagnement personnalisé d’une banque avec pignon sur rue. ADN des agences bancaires, la relation banquier-client reste une valeur sûre et la profession bancaire n’est pas prête à renoncer à sa casquette de « bon samaritain ». Point fort de cette dernière ? Elle encourage et accompagne au mieux la concrétisation des projets de son client en particulier chez les jeunes en demande de soutien face à une vie active qui peut faire peur. Engagée dans différents dispositifs de suivi, les banques ont développé des politiques en faveur de l’égalité sociale en apportant des solutions pérennes à des problèmes socio-économiques. La liste est longue: éducation, aide à l’apprentissage, microcrédit, point de conseil en cas de bouleversements comme le décès d’un conjoint, un chômage ou encore un départ à la retraite… De quoi faire rougir des banques mobiles qui ne peuvent pas toujours faire face à ces demandes fondamentales.
Mobiles, pratiques et directes, les néo-banques se révèlent donc être des moyens simples à l’accès aux services bancaires… Trop simple peut-être face à la réalité financière de particuliers qui désirent encore trouver des solutions concrètes dans un service bancaire qui ne se résumerait pas à un dialogue d’écran à écran.